Isabelle Loodts

De Néandertal aux déchets nucléaires en passant par les déchets de guerre. 
J'ai une formation d'archéologue, spécialisée en préhistoire. Pendant 7 ans, j'ai travaillé dans ce domaine, en particulier sur un site de fouille belge du paléolithique moyen sur lequel on a retrouvé des restes d'Homme de Neandertal. Pendant longtemps je me suis donc passionnée pour cette période très lointaine (+/-100.000 ans).
Mais quand je suis devenue maman, j'ai ressenti le besoin de pouvoir m'intéresser aussi au monde qui nous entoure, et d'avoir davantage prise sur lui. Je suis devenue journaliste indépendante.
L'environnement, et les relations que l'homme entretient avec lui, est resté mon fil conducteur, au fil des changements professionnels. C'est comme ça que, contre toute attente, 14-18 a surgi dans ma vie alors que je ne m'y attendais pas du tout. Même si j'apprécie l'histoire, cette période ne m'attirait pas : trop de sang, un récit en noir et blanc, des armes, la guerre... En 2009, mon père m'a demandé de l'aider à mettre en forme ses recherches personnelles sur l'histoire des soins médicaux durant la Première guerre mondiale. Je l'ai fait pour lui faire plaisir, et j'ai découvert un aspect de cette guerre passionnant, l'aspect humain, et la place des femmes en particulier durant cette période. 
Les archéologues ont ceci de particulier par rapport aux historiens qu'ils ont besoin de tâter le terrain, d'aller voir ce qui reste sur place. C'est comme ça qu'un jour, je me suis retrouvée à Vauquois, ce village détruit qui fut le théâtre de la guerre des mines. Sur cette butte, j'ai immédiatement compris que j'étais face à plusieurs paradoxes. 
Le premier était celui qu’exprime le géographe Yves Lacoste : « (…) parmi les endroits d’où l’on peut voir un paysage, celui dont la vue est la plus belle est presque toujours celui qui est le plus intéressant dans un raisonnement de tactique militaire ». 
Le second était que ce paysage porteur de cicatrices très visibles était aussi devenu un lieu de biodiversité. J'ai eu l'intuition que les paysages de la Grande Guerre avaient beaucoup de choses à nous raconter, et c'est comme ça que je me suis lancée dans une enquête sur l'héritage environnemental de la Première guerre mondiale, pour laquelle j'ai reçu, en 2011, le soutien du Fonds pour le Journalisme. 
J'ignorais alors que je tirais sur le fil d'une gigantesque pelote de laine, et que celui-ci m'amènerait à m'intéresser aux déchets nucléaires.

-> Vidéo de la rencontre